lundi 11 mars 2019

Hallucinants !

Il est un argument actuellement de plus en plus brandi par "le camp d'en face" sur lequel il nous avons pensé devoir nous pencher.
 Un argument qui apparaît particulièrement souvent dans les propos de M. Michel Reynaud.
Exemple récent «à propos du lobby de l'alcool» : «Le modèle économique est fait sur les buveurs à risques» et «10% des Français consomme 58% de l'alcool vendu» : https://www.franceinter.fr/emissions/l-invite-de-6h20/l-invite-de-6h20-19-fevrier-2019.
Nous avons trouvé d'autres articles avec des chiffres un peu différents... mais il faut faire la part de l'interprétation journalistique à tendance parfois simplificatrice.

Alors, nous avons préféré aller à la source en consultant l'étude à laquelle ces propos font référence... et cela nous a amené à opérer une sorte de "réfutation par l'absurde".
Cette étude, la voici : http://invs.santepubliquefrance.fr/beh/2019/5-6/pdf/2019_5-6_1.pdf.
Nous invitons les lecteurs n'ayant pas envie de la lire en totalité à consulter directement les figures et tableau.
Figure 1 page 92 : «10% des 18-75 ans consomment 58% de l’alcool».
Quant à la figure 3 page 94, elle montre à l'évidence que plus la consommation est régulière, moins elle est importante.
Et comporte ce commentaire : «18-75 ans : 98 jours - 2,3 verres».

Voir aussi  l'interprétation de la figure 2 p.93 en haut à droite de cette même page 93 : «Parmi les 18-75  ans, les  consommateurs  d’alcool dans l’année buvaient en moyenne 2,3 verres d’alcool 98 jours par an.»
 Mais n'oublions pas que ces chiffres sont issus d'une «Enquête  en  population  générale» qui «a été  confiée à  l’institut Ipsos».
Et qu'il faut faire la part des sous-déclarations.
Pour ce qui est de la fréquence, nous pensons pouvoir considérer qu'elle correspond à la réalité : 98 jours/an, environ 2 jours par semaine, cela nous semble cohérent.
 Bien dommage, pour nous qui sommes partisans d'une consommation régulière, modérée et s'effectuant au cours des repas (0 poids éthanol ≤ 1% poids total), mais cohérent.
Par contre, en ce qui concerne la quantité, 2,3 × 98 = 225.4 verres/an soit 2,78 litres d'alcool pur/an, cela nous semble fort peu !
Or, il ne faut pas oublier les données objectives de «mise à la consommation».

«En 2017, le nombre de litres d’alcool pur mis à la consommation correspond en moyenne à 2,56 verres "standard" ou unité standard d’alcool (un verre standard contient environ 10 g d’alcool pur) consommés chaque jour par chaque habitant âgé de 15 ans et plus.» : https://www.ofdt.fr/statistiques-et-infographie/series-statistiques/alcool-evolution-des-quantites-consommees-par-habitant-age-de-15-ans-et-plus-depuis-1961-en-litres-equivalents-dalcool-pur/.
Et dans le tableau (p. 92), il apparaît que la «quantité d'alcool consommé (en litres équivalents d'alcool pur) par habitant de 15 ans et plus)» était, pour l'année 2017, égale à 11,68,..
Excluons immédiatement l'hypothèse selon laquelle les [15-17 ans] et les [+ de 75[ consommeraient la différence !
Tout semble à l'inverse laisser à penser que les consommations de ces 2 groupes d'âge est en moyenne moins élevée que celle des [18-75].
D'autant plus que nous savons depuis 2005 «qu’il y a un certain tassement de la prévalence de la consommation à partir de 70 ans» : http://invs.santepubliquefrance.fr/beh/2006/34_35/beh_34_35_2006.pdf (figure 4, page 257, voir aussi la part des [15-17]).
Mais, bon... prenons les chiffres de répartition par âges de la population française en 2017 et constatons que les [18-75] représentent environ 92% des [+ de 15[ : https://www.insee.fr/fr/outil-interactif/2418114/xls/irsocsd2016_t6_fe.xls.
Et considérons donc que généraliser les données n'affectera pas trop les résultats.
Donc, 2,56 verres standard/jour... pendant toute l'année.

2,56 × 365,25 ≈ 935.
935 ÷ 92 ≈ 10.
10 verres "standard" par jour de consommation (2 fois par semaine) !
Et cela en moyenne !!
Et "unisexe", il ne faut pas l'oublier : multiplier par 6/5 pour les hommes et 4/5 pour les femmes.
Mais notons bien que pour les 10% qui «consomment 58% de l’alcool», c'est beaucoup, beaucoup plus : 10 × 58% ÷10% ≈ 58 !!!
Utilisons les dernières données disponibles concernant la répartition par types de boissons éthanoliques : https://www.ofdt.fr/BDD/publications/docs/eftxfbv3.pdf.
Et opérons une simulation pour un jour de consommation par individu appartenant au "groupe des 10%" :
4 bouteilles de vin + 3 litres de bière + 1/2 bouteille de vodka + 4 verres d’un «autre alcool» (cidre, aperitifs divers, etc...) !!!!
Et cela 2 fois par semaine : des chiffres hallucinants !!!!!
Et dire que moins de la moitié de 10% (4,6%) des personnes interrogées ont déclaré (tableau p.92) un épisode d'«alcoolisation ponctuelle importante au moins une fois par semaine»...

10% des [18-75 ans], c'est environ 7,5% de la population totale (bébés compris).
Environ 1 sur 13...
À tous, nous posons une question simple : vous arrive-t-il, 2 fois par semaine, chaque fois que vous avez croisé 12 personnes dans la rue, de constater que la treizième est totalement ivre-morte ?
En plein coma éthylique ?
Titubant, s'écroulant, roulant dans le caniveau... et passons sur les détails peu râgoutants*.
Car, par définition, ces consommateurs ultra-excessifs ne font pas partie de ceux qui ont été "retirés de la circulation" car en cas inverse ils seraient hospitalisés et seraient comptés au nombre des abstinents, n'est-ce pas ?

Question simple à présent : franchement, les arguments qu'on nous oppose... sont-ils crédibles ?

Nota Bene 1 :
Par souci d'honnêteté intellectuelle, nous avons pensé qu'il pouvait aussi y avoir sous-estimation du nombre de jours de consommation et que si tel était le cas elle pouvait être parallèle au coefficient de sous-estimation affectant le nombre de verres.
98 ÷ 2,3 × 2,56 ≈ 109
+ 11%
Pas de quoi changer fondamentalement la démonstration.
Nota Bene 2 :
Nous nous sommes également intéressés à la consommation de la majorité des français, c'est à dire ceux qui ne font pas partie de «la moitié (49%) des 18-75 ans» qui «consomment 3% de l’alcool» (Fig. 1) et nous avons obtenu, en terme de consommation moyenne type, un résultat moins impressionnant, certes, mais tout aussi peu crédible.
En gros : une voiture croisée sur 4 qui zigzague  !

*Et bien beau s'il ne s'agit pas d'un cadavre, puisque «théoriquement, à partir d’un taux de 3 g/L, le coma éthylique survient. Et à 5 g/l, la mort.» : https://www.permis-de-exploitation.com/787-l-2g-alcool.html.

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