En extrapolant cohéremment à partir de données fausses, c'est évident, on parvient à des chiffres tout aussi faux.
Mais on peut aussi parvenir à des chiffres analogues par extrapolation incohérente, cela en partant de données, par contre, très probablement exactes.
Retournons au compte-rendu de la journée d’information sur les Troubles Causés par l’Alcoolisation Fœtale qui s’est déroulée le mercredi 6 septembre 2017 : http://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/les_actes_saf.pdf.
La personne qui a rédigé la présentation de la journée (p. 3) et qui parle sans doute au nom de l'ensemble des associations organisatrices, nous dit que : «8 000 enfants naissent en France chaque année avec le cerveau lésé par l’alcool».
Chiffre de 8 000 que nous mettons fortement en doute au vu des études qui ont été réalisées (voir notre dossier "Picto", articles 2, 3, 4, 5, et 6).
Cette même personne ajoute un peu plus bas que : «Dans la population générale, on estime à plus de 600 000 les personnes souffrant de TCAF (Troubles Causés par l’Alcoolisation Fœtale) sans le savoir.»
Ce qui est relativement cohérent et nous allons le démontrer.
Tout en rappelant préalablement que le raisonnement porte sur le cumul des 1% des naissances qui ont permis à toute la population française vivante à ce jour d'être de ce monde.
Donc : des décennies de naissances.
Or, l'âge moyen des français, en 2016, était de 41 ans : https://www.insee.fr/fr/statistiques/2381476.
C'est à dire qu'en 2017 le français d'âge moyen était né en 1976 année en laquelle l'espérance de vie à la naissance était approximativement (voir graphique ci-contre) de... 74 ans.
74 × 8 000 = 592 000 : nous y sommes... presque !
Un petit coup d'"arrondi", et c'est bon.
Maintenant, retournons au premier document cité, le compte-rendu de la journée d’information sur les Troubles Causés par l’Alcoolisation Fœtale.
Que nous dit Mme Buzyn à cheval entre les pages 6 et 7 ?
Ceci : «Nous avons donc à l’arrivée trop d’enfants qui présentent des troubles causés par ce syndrome d’alcoolisation fœtale. Nous savons qu’au sein de notre société aujourd’hui, 500 000 personnes souffrent à des degrés divers des conséquences de cette consommation.»
Par contre, dans le cadre de l'allocution prononcée ce jour là, Mme la Ministre de la Santé n'a pas jugé bon de rappeler sa propre estimation du nombre de nouveaux nés concernés.
Pas grave car elle s'est exprimée sur ce point à de nombreuses reprises, y compris postérieurement à cette journée, par exemple le 28 mars dernier :
«Un enfant sur 1000 nait aujourd’hui avec un handicap lié à l’alcoolisme fœtal» (http://solidarites-sante.gouv.fr/actualites/presse/discours/article/intervention-de-madame-agnes-buzyn-ministre-des-solidarites-et-de-la-sante).
Bon, là, d'accord : chiffre en cohérence avec ceux que fournissent les études réalisées.
Félicitations à l'ancienne présidente de Haute Autorité de Santé pour ne pas avoir oublié les vrais données en entrant au gouvernement !
Et surtout dans ce ministère infesté de fachygiénistes cocacollaborationnistes.
Mais il y a un problème.
Expliquons-nous :
1) l'espérance de vie "unisexe" moyenne est actuellement de 83 ans (revoir graphique ci-dessus),
2) le nombre moyen annuel de victimes d'alcoolisation fœtale depuis 83 ans serait donc selon Mme Buzyn de 6 024 (500000/83),
3) par conséquent, si l'on suit Mme la Ministre, le nombre moyen de naissances en France au cours des 83 dernières années a été de 6,024 millions (6 024 × 1 000),
4) et donc, la population française, tous âges confondus, devrait aujourd'hui s'élever à 500 millions de personnes (6,024 × 83).
Or, chacun sait qu'il n'en est rien : https://www.ledauphine.com/france-monde/2017/12/27/la-france-compte-66-190-280-habitants.
Erreurs de calcul ou double langage ?
Bon... en même temps... on comprend que donner un chiffre équivalent au dixième de celui qu'avancent les organisateurs de la journée, ça peut être délicat.
Mais il est à noter que M. Nicolas Prisse, Président de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA), l'a bien fait lui : «ce sont environ 600 enfants atteints qui naissent chaque année en France».
Il est même allé jusqu'au 1/13ème !
Nota Bene : cet article est intégré dans notre dossier "Picto" (nº7).
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